1- Le poète des Amours

Télécharger
Cours au 14 novembre
Le poète des Amours 2021-22.pdf
Document Adobe Acrobat 782.6 KB

Un podcast au sujet de l'oeuvre de Ronsard (France Culture, 2017).


Le petit enfant Amour
Cueillait des fleurs à l'entour D'une ruche, où les avettes Font leurs petites logettes. Comme il allait les cueillant, Une avette sommeillant Dans le fond d'une fleurette Lui piqua sa main douillette. Sitôt que piqué se vit, « Ah, je suis perdu ! » se dit, Et, s'en courant près de sa mère, Lui montra sa plaie amère ; « Ma mère, voyez ma main, Ce disait Amour, tout plein De pleurs, voyez quelle enflure M'a fait une égratignure ! » Alors Vénus se sourit Et en le baisant le prit, Et sa main lui a soufflée Pour guérir sa plaie enflée. « Qui t'a, dis-moi, faux garçon, Blessé de telle façon ? Sont-ce les Grâces riantes, De leurs aiguilles poignantes ? - Nenni, c'est un serpenteau, Qui vole au printemps nouveau Avecques deux ailerettes Ça et là sur les fleurettes. - Ah ! vraiment je le connais, Dit Vénus ; les villageois De la montagne d'Hymette Le surnomment Mélicerte. Si doncques un animal Si petit fait tant de mal, Quand son alène époinçonne La main de quelque personne, Combien fais-tu de douleur, Auprès de lui, dans le cœur De celui en qui tu jettes Tes venimeuses sagettes ? »

Odes, 1550.

Mignonne, allons voir si la rose

 

Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avoit desclose
Sa robe de pourpre au Soleil,
A point perdu cette vesprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vostre pareil.
  
Las ! voyez comme en peu d’espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las! las ses beautez laissé cheoir !
Ô vrayment marastre Nature,
Puis qu’une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !

Donc, si vous me croyez mignonne,
Tandis que vostre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez cueillez vostre jeunesse :
Comme à ceste fleur la vieillesse
Fera ternir vostre beauté.

 

Ode à Cassandre, édition de 1584.

J’espère et crains, je me tais et supplie,
Or’ je suis glace, et ores un feu chaud,
J’admire tout, et de rien ne me chaut,
Je me délace, et puis je me relie.

Rien ne me plaît sinon ce qui m’ennuie :
Je suis vaillant, et le cœur me défaut,
J’ai l’espoir bas, j’ai le courage haut,
Je doute Amour, et si je le défie.

Plus je me pique, et plus je suis rétif,
J’aime être libre, et veux être captif,
Cent fois je meurs, cent fois je prends naissance.

Un Prométhée en passions je suis,
Et pour aimer perdant toute puissance,
Ne pouvant rien je fais ce que je puis.


Prolongement : se documenter au sujet de Baudelaire

L'émission Une vie, une oeuvre est disponible sur le site Internet de France Culture.

 

Écoutez ce podcast (émission en balado-diffusion) pour apprendre comment Charles Baudelaire a tenté de gagner sa vie d'écrivain à Bruxelles.


Écrire la "suite" de À une passante

Compétence du programme en jeu : "Pratiquer l’écriture d’invention".

> Connaissance des caractéristiques des genres littéraires pour composer des écrits créatifs, en intégrant éventuellement différents supports.

 

Voici quelques pièces poétiques composées par les élèves de 4e A. Il se sont inspirés du célèbre poème de Charles Baudelaire À une passante et ont imaginé une seconde rencontre plus propice à l'échange.

 

Source de l'image : theme-et-texte.eu


 

Les 4 temps simples de l'indicatif

Le moment où on parle :

présent simple

Fait à venir :

futur simple

Fait passé de 1er plan :

passé simple

Fait passé en train de se dérouler : imparfait

 

Exemple du poème : fascine

 

Exemple du poème :

verrai

Exemple du poème :

passa

Exemple du poème :

hurlait

Conjugaison complète

Conjugaison complète

Conjugaison complète

Conjugaison complète

Je fascine

Je verrai

Je passai

Je hurlais

Tu fascines

tu verras

Tu passas

Tu hurlais

Il/elle/on fascine

Il/elle/on verra

Il/elle/on passa

Il/elle/on hurlait

Nous fascinons

Nous verrons

Nous passâmes

Nous hurlions

Vous fascinez

Vous verrez

Vous passâtes

Vous hurliez

Ils/elles fascinent

Ils/elles verront

Ils/elles passèrent

Ils/elles hurlaient

 

 

moudre

résoudre

vendre

peindre

prendre

craindre

je mouds

je résous

je vends

je peins

je prends

je crains

tu mouds

tu résous

tu vends

tu peins

tu prends

tu crains

il moud

elle résout

elle vend

elle peint

elle prend

elle craint

nous moulons

nous résolvons

nous vendons

nous peignons

nous prenons

nous craignons

vous moulez

vous résolvez

vous vendez

vous peignez

vous prenez

vous craignez

elles moulent

elles résolvent

elles vendent

elles peignent

elles prennent

elles craignent

 

 

Venir

Dire

Vouloir

Ouvrir

Mettre

Vaincre

Je viens

Je dis

Je veux

J'ouvre

Je mets

Je vaincs

Tu viens

Tu dis

Tu veux

Tu ouvres

Tu mets

Tu vaincs

Il vient

Il dit

Il veut

Il ouvre

Il met

Il vainc

Nous venons

Nous disons

Nous voulons

Nous ouvrons

Nous mettons

Nous vainquons

Vous venez

Vous dites

Vous voulez

Vous ouvrez

Vous mettez

Vous vainquez

Ils viennent

Ils disent

Ils veulent

Ils ouvrent

Ils mettent

Ils vainquent

 


Léo Ferré interprète la "Complainte Rutebeuf" (1956)


Le texte intégral de la Complainte Rutebeuf (en rouge les vers chantés par Léo Ferré) :

Ne covient pas je vos raconte                Ne convient pas que je vous raconte
Coument je me sui mis a hunte,              Comment je me suis mis à honte,
Quar bien aveiz oï le conte                     Car vous avez bien ouï le conte,
En queil meniere                                        En quelle manière

Je pris ma fame darreniere,                   Je pris ma femme dernière,
Qui bele ne gente nen iere.                     Qui n'était ni belle ni distinguée !
Lors nasqui painne                                    Alors naquit ma peine

Qui dura plus d’une semainne,                Qui dura plus d'une semaine,
Qu’el coumensa en lune plainne.            Car elle commença à la pleine lune.
Or entendeiz,                                             Alors écoutez,

Vos qui rime me demandeiz,                    Vous qui des rimes me demandez,
Coument je me sui amendeiz                   Comment j'ai su profiter
De fame panrre.                                         De femme prendre.

Je n’ai qu’engagier ne que vendre,        Je n'ai plus rien à mettre en gage, à vendre,
Que j’ai tant eü a entendre                      Tant j'ai eu de choses à penser,
Et tant a faire,                                             Et tant à faire,

Et tant d’anui et de contraire,                  Et tant d'ennuis et de problèmes,  

Car, qui le vos vauroit retraire,               Si bien que si je voulais vous le narrer,
Il durroit trop.                                              Ce serait trop long !

Diex m’a fait compaignon a Job :              Dieu a fait de moi un autre Job,
Il m’a tolu a un sol cop                                M'a arraché, d'un seul coup,
Quanque j’avoie.                                         Tout ce que j'avais.

De l’ueil destre, dont miex veoie,              De l'oeil droit, dont je vois le mieux,
Ne voi ge pas aleir la voie                         Je ne vois ni où va la route,
Ne moi conduire.                                          Ni où me conduire.

Ci at doleur dolante et dure,                     C'est une véritable torture,
Qu’endroit meidi m’est nuit oscure          Qu'en plein midi une nuit obscure
De celui eul.                                                   Voile cet oeil.

Or n’ai ge pas quanque je weil,                 Loin de voir tous mes voeux exaucés,
Ainz sui dolanz et si me dueil                    Je suis souffrant et me morfonds
Parfondement,                                             Si profondément,

C’or sui en grant afondement                   Que je suis au fond du trou,
Ce par ceulz n’ai relevement                     Si ne me relèvent pas ceux
Qui jusque ci                                                 Qui, jusqu'ici,

M’ont secorru, la lor merci.                        M'ont secouru, à eux merci.  
Moult ai le cuer triste et marri                  Je suis bien triste et contrarié
De cest mehaing,                                         De ce tourment,

Car je n’i voi pas mon gaaing.                   Car je n'y vois pas de profit.      
Or n’ai je pas quanque je aing:                 Ce que j'attends, je ne l'ai pas :
C’est mes damaiges.                                   C'est mon malheur !

Ne sai ce s’a fait mes outrages.                Je ne sais si c'est à cause de mes outrages.
Or devanrrai sobres et sages                  Je deviendrai sobre et raisonnable

Aprés le fait                                                  Désormais,

Et me garderai de forfait.                          Et me tiendrai à l'écart de toute faute.
Mais ce que vaut quant c’est ja fait?       Mais à quoi bon, quand c'est déjà fait ?
Tart sui meüz.                                               Je réagis trop tard.

A tart me sui aparceüz                               C'est tard que je me suis aperçu
Quant je sui en mes laz cheüz                   Alors que j'étais pris au piège
Ce premier an.                                              En cette première année.

Me gart cil Diex en mon droit san             Que Dieu me garde en mon bon sens,
Qui por nous ot poinne et ahan,                Lui qui pour nous connut peines et épreuves,
Et me gart l’arme !                                       Et garde mon âme !

Or a d’enfant geü ma fame;                      Ma femme vient d'avoir un enfant ;
Mes chevaux ot brizié la jambe                Mon cheval de se briser la patte
A une lice;                                                     A une barrière ;

Or wet de l’argent ma norrice,                 Me réclame de l'argent ma nourrice,
Qui m’en destraint et m’en pelice             Et elle m'étrangle, et elle me dépèce,
Por l’enfant paistre,                                     Pour que l'enfant mange,

Ou il revanrra braire en l’aitre.                 Sinon il reviendra au foyer brailler.
Cil sire Diex qui le fit naitre                        Que Seigneur Dieu qui le fit naître
Li doint chevance                                         Lui donne de quoi vivre

Et li envoit sa soutenance,                         Lui envoie sa subsistance,
Et me doint ancor alijance                         Qu'il me soutienne à l'avenir
Qu’aidier li puisse,                                       Pour que je puisse l'aider,

 

 

Et que miex son vivre li truisse,                Que je gagne mieux son pain,
Et que miex mon hosteil conduisse          Que je gère mieux ma maison
Que je ne fais.                                             Que je ne le fais.

Ce je m’esmai, je n’en puis mais,               Cela m'angoisse, je n'en peux plus,
Car je n’ai douzainne ne fais,                    Car je ne fais aucun tas
En ma maison,                                              En mon foyer,

De buche por ceste saison.                        De bûches, pour le moment.
Si esbahiz ne fu nunz hom                          Jamais homme ne fut aussi dérouté
Com je sui voir,                                            Que je le suis,

C’onques ne fui a mainz d’avoir.               Car jamais je n'ai eu aussi peu d'argent.
Mes hostes wet l’argent avoir                   Mon propriétaire veut le loyer
De son hosteil,                                              De sa maison,

Et j’en ai presque tout ostei,                     Je l'ai presque entièrement vidée,
Et si me sunt nu li costei                             Ainsi j'ai les flancs dénudés
Contre l’iver,                                                 Face à l'hiver,

Dont mout me sunt changié li ver             Mes vers ont de beaucoup différé
(Cist mot me sunt dur et diver)                 (Ces mots me sont durs et cruels)
Envers antan.                                               De l'an dernier.

Par poi n’afoul quant g’i enten.                 J'en deviens presque fou quand j'y pense.
Ne m’estuet pas tenneir en ten;                Nul besoin de me tanner en tan ;
Car le resvuoil                                              Car le réveil

Me tenne asseiz quant je m’esvuoil;         Me tanne assez quand je m'éveille ;
Si ne sai, se je dor ou voil                           Je ne sais, que je dorme, que je veille,
Ou se je pens,                                              Ou que je pense,

Queil part je panrrai mon despens           Où trouver de quoi payer,

De quoi passeir puisse cest tens:               De quoi passer cette mauvaise période :
Teil siecle ai gié.                                            Tel est mon destin.

Mei gage sunt tuit engaigié                         J'ai mis en gage tout ce que je pouvais
Et d’enchiez moi desmenagiei,                    J'ai tout déménagé de chez moi,
Car g’ai geü                                                    Car je suis resté couché

Trois mois, que nelui n’ai veü.                      Trois mois, sans voir personne.
Ma fame ra enfant eü,                                   Ma femme, ayant eu l'enfant,
C’un mois entier                                             Un mois entier

Me ra geü sor le chantier.                             Est restée à mes côtés.
Ge [me] gisoie endementier                         J'étais alité, pendant ce temps,
En l’autre lit,                                                     Dans l'autre lit,

Ou j’avoie pou de delit.                                 Où j'eus peu de distractions,
Onques mais moins ne m’abelit                   Jamais je n'eus moins de plaisir
Gesirs que lors,                                               A être couché qu'en ce temps-là,

Car j’en sui de mon avoir fors                     Car j'en ai perdu mes biens,
Et s’en sui mehaigniez dou cors                   Et en suis resté infirme
Jusqu’au fenir.                                                Pour le restant de mes jours.

Li mal ne seivent seul venir;                        Un malheur n'arrive jamais seul ;
Tout ce m’estoit a avenir,                            Tout cela devait m'arriver,
C’est avenu.                                                   C'est fait.

Que sunt mi ami devenu                            Que sont mes amis devenus
Que j’avoie si pres tenu                             Que j'avais de si près tenus
Et tant amei?                                                Et tant aimés ?

Je cuit qu’il sunt trop cleir semei ;            Je crois qu'ils furent trop clairsemés ;
Il ne furent pas bien femei,                        Ils n'eurent pas assez d'engrais,
Si sunt failli.                                                   Ils ont donc disparu.

Iteil ami m’ont mal bailli,                              Ces amis-là ne m'ont pas bien traité,
C’onques, tant com Diex m’assailli            Jamais, tant que Dieu m'accabla
E[n] maint costei,                                          De tous côtés,

N’en vi .I. soul en mon ostei.                       Je n'en vis un seul à mes côtés.
Je cui li vens les m’at ostei,                       Je crois, le vent me les a ôtés,

L’amours est morte:                                    L'amitié est morte.

Se sont ami que vens enporte,                  Ce sont des amis que le vent emporte,

Et il ventoit devant ma porte,                    Et il ventait devant ma porte,
Ces enporta,                                                 Il les emporta.

C’onques nuns ne m’en conforta             Ainsi jamais personne ne m'aida,
Ne du sien rien ne m’aporta.                     Ne me tira rien de sa bourse.
Ice m’aprent                                                 Cela m'apprend

Qui auques at, privei le prent;                  Que le peu qu'on a, un ami le prend ;
Et cil trop a tart ce repent                        Mais c'est trop tard qu'il se repent
Qui trop a mis                                              Celui qui a mis

De son avoir a faire amis,                         Trop d'argent à ses faire des amis,
Qu’il nes trueve entiers ne demis            Car, pas un de sincère, même à demi,
A lui secorre.                                                Pour l'aider.

Or lairai donc Fortune corre,                   Je cesserai donc de courir la Fortune,
Si atendrai a moi rescorre,                        M'appliquerai à retrouver mon bien,
Se jou puis faire.                                          Si j'y parviens.

Vers les bone gent m’estuet traire         Il faut me tourner vers les gens de bien
Qui sunt preudome et debonaire            Ceux qui, nobles et généreux,
Et m’on norri.                                               M'ont nourri.

Mi autre ami sunt tuit porri :                      Mes autres amis sont tous pourris :
Je les envoi a maitre Horri                        Je les envoie à la poubelle
Et cest li lais,                                                 Et les y laisse,


C’on en doit bien faire son lais                  Des gens pareils, on peut les oublier
Et teil gent laissier en relais                      Et laisser telle engeance dans un coin
Sens reclameir,                                            Sans rien demander,

Qu’il n’a en eux riens a ameir                    Car il n'y a rien à aimer en eux
Que l’en doie a amor clameir.                    Rien qui puisse se dire amitié.
[Or prie Celui                                                Je prie donc celui

Qui trois parties fist de lui,                         Qui se partagea en trois personnes,
Qui refuser ne set nului                              Qui ne sait refuser aucun
Qui le reclaime,                                             De ceux qui l'invoquent,

Qui l’aeure et seignor le claime,                Qui l'adorent et l'appellent seigneur,
Et qui cels tempte que il aime,                    Celui qui éprouve ceux qu'il aime,
Qu’il m’a tempté,                                           Et il m'a éprouvé,

Que il me doint bone santé,                        Qu'il me donne bonne santé,
Que je face sa volenté                                Que je fasse sa volonté
Mais cens desroi.                                          Mais sans faillir.


Monseigneur qui est fiz de roi                    A Monseigneur, qui est fils de roi,
Mon dit et ma complainte envoi,                J'envoie cette anecdote et ma complainte,

Qu’il m’est mestiers,                                     Car j'ai besoin de lui,

Qu’il m’a aidé mout volentiers:                   Car il m'a aidé de bonne grâce :
C’est li boens cuens de Poitiers                 C'est le bon comte de Poitiers
Et de Toulouze.                                              Et de Toulouse.

Il saurat bien que cil golouze                      Il saura bien ce que je désire,
Qui si faitement se dolouze.                       Celui qui souffre autant que moi.
Explicit.                                                            Fin (livre déployé).