Parcours associé n°1
Science et fiction
1. Mary Shelley, Frankenstein ou le Prométhée moderne (1831, chapitre 5 ; traduction Germain d’Angest ; wikisource.org) : « Ce fut par une lugubre nuit […] sans pouvoir goûter de sommeil ».
Ce fut par une lugubre nuit de novembre que je contemplai mon œuvre terminée. Dans une anxiété proche de l’agonie, je rassemblai autour de moi les instruments qui devaient me permettre de faire passer l’étincelle de la vie dans la créature inerte étendue à mes pieds. Il était déjà une heure du matin ; une pluie funèbre martelait les vitres et ma bougie était presque consumée, lorsque à la lueur de cette lumière à demi éteinte, je vis s’ouvrir l’œil jaune et terne de cet être ; sa respiration pénible commença, et un mouvement convulsif agita ses membres.
Comment décrire mes émotions en présence de cette catastrophe, ou dessiner le malheureux qu’avec un labeur et des soins si infinis je m’étais forcé de former ? Ses membres étaient proportionnés entre eux, et j’avais choisi ses traits pour leur beauté. Pour leur beauté ! Grand Dieu ! Sa peau jaune couvrait à peine le tissu des muscles et des artères ; ses cheveux étaient d’un noir brillant, et abondants ; ses dents d’une blancheur de nacre ; mais ces merveilles ne produisaient qu’un contraste plus horrible avec les yeux transparents, qui semblaient presque de la même couleur que les orbites d’un blanc terne qui les encadraient, que son teint parcheminé et ses lèvres droites et noires.
Les accidents variés de la vie ne sont pas aussi sujets au changement que les sentiments humains. Depuis près de deux ans, j’avais travaillé sans relâche dans le seul but de communiquer la vie à un corps inanimé. Je m’étais privé de repos et d’hygiène. Mon désir avait été d’une ardeur immodérée, et maintenant qu’il se trouvait réalisé, la beauté du rêve s’évanouissait, une horreur et un dégoût sans bornes m’emplissaient l’âme. Incapable de supporter la vue de l’être que j’avais créé, je me précipitai hors de la pièce, et restai longtemps dans le même état d’esprit dans ma chambre, sans pouvoir goûter de sommeil.
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2. Auguste de Villiers de l’Isle-Adam, L’Ève future (1886, livre VI, chap. 1 ; wikisource.org) : « Édison dénoua […] une parole d’interruption ».
Edison dénoua le voile noir de la ceinture.
― L’Andréïde, dit-il impassiblement, se subdivise en quatre parties :
1° Le Système-vivant, intérieur, qui comprend l’Équilibre, la Démarche, la Voix, le Geste, les Sens, les Expressions-futures du visage, le Mouvement-régulateur intime, ou, pour mieux dire, « l’Âme ».
2° Le Médiateur-plastique, c’est-à-dire l’enveloppe métallique, isolée de l’Épiderme et de la Carnation, sorte d’armure aux articulations flexibles en laquelle le système intérieur est solidement fixé.
3° La Carnation (ou chair factice proprement dite) superposée au Médiateur et adhérente à lui, qui, ― pénétrante et pénétrée par le fluide animant, ― comprend les Traits et les Lignes du corps-imité, avec l’émanation particulière et personnelle du corps reproduit, les repoussés de l’Ossature, les reliefs-Veineux, la Musculature, la Sexualité du modèle, toutes les proportions du corps, etc.
4° L’Épiderme ou peau-humaine, qui comprend et comporte le Teint, la Porosité, les Linéaments, l’éclat du Sourire, les Plissements-insensibles de l’Expression, le précis mouvement labial des paroles, la Chevelure et tout le Système-pileux, l’Ensemble-oculaire, avec l’individualité du Regard, les Systèmes dentaires et ungulaires.
Edison avait débité cela du ton monotone avec lequel on expose un théorème de géométrie dont le quod erat demonstrandum1 est virtuellement contenu dans l’exposé même. Lord Ewald sentait, dans cette voix, que non seulement l’ingénieur allait résoudre, au moins théoriquement, les postulata2 que cette série d’affirmations monstrueuses suscitait dans l’esprit, mais qu’il les avait déjà résolus et allait en fournir la preuve.
C’est pourquoi le noble Anglais, remué outre mesure par l’aplomb terrible de l’électricien, sentit le froid de la Science lui glacer le cœur à cet extraordinaire énoncé. Néanmoins, en homme calme, il ne prononça pas une parole d’interruption.
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3. Guy de Maupassant, Le Horla (1887 ; wikisource.org) : « 19 août […] il est venu !... ».
19 août. — Je sais… je sais… je sais tout ! Je viens de lire ceci dans la Revue du Monde scientifique : « Une nouvelle assez curieuse nous arrive de Rio de Janeiro. Une folie, une épidémie de folie, comparable aux démences contagieuses qui atteignirent les peuples d’Europe au moyen âge, sévit en ce moment dans la province de San-Paulo. Les habitants éperdus quittent leurs maisons, désertent leurs villages, abandonnent leurs cultures, se disant poursuivis, possédés, gouvernés comme un bétail humain par des êtres invisibles bien que tangibles, des sortes de vampires qui se nourrissent de leur vie, pendant leur sommeil, et qui boivent en outre de l’eau et du lait sans paraître toucher à aucun autre aliment.
« M. le professeur Don Pedro Henriquez, accompagné de plusieurs savants médecins, est parti pour la province de San-Paulo, afin d’étudier sur place les origines et les manifestations de cette surprenante folie, et de proposer à l’Empereur les mesures qui lui paraîtront le plus propres à rappeler à la raison ces populations en délire. »
Ah ! Ah ! je me rappelle, je me rappelle le beau trois-mâts brésilien qui passa sous mes fenêtres en remontant la Seine, le 8 mai dernier ! Je le trouvai si joli, si blanc, si gai ! L’Être était dessus, venant de là-bas, où sa race est née ! Et il m’a vu ! Il a vu ma demeure blanche aussi ; et il a sauté du navire sur la rive. Oh ! mon Dieu !
À présent, je sais, je devine. Le règne de l’homme est fini.
Il est venu, Celui que redoutaient les premières terreurs des peuples naïfs, Celui qu’exorcisaient les prêtres inquiets, que les sorciers évoquaient par les nuits sombres, sans le voir apparaître encore, à qui les pressentiments des maîtres passagers du monde prêtèrent toutes les formes monstrueuses ou gracieuses des gnomes, des esprits, des génies, des fées, des farfadets. Après les grossières conceptions de l’épouvante primitive, des hommes plus perspicaces l’ont pressenti plus clairement. Mesmer l’avait deviné, et les médecins, depuis dix ans déjà, ont découvert, d’une façon précise, la nature de sa puissance avant qu’il l’eût exercée lui-même. Ils ont joué avec cette arme du Seigneur nouveau, la domination d’un mystérieux vouloir sur l’âme humaine devenue esclave. Ils ont appelé cela magnétisme, hypnotisme, suggestion… que sais-je ? Je les ai vus s’amuser comme des enfants imprudents avec cette horrible puissance ! Malheur à nous ! Malheur à l’homme ! Il est venu, le… le… comment se nomme-t-il… le… il me semble qu’il me crie son nom, et je ne l’entends pas… le… oui… il le crie… J’écoute… je ne peux pas… répète… le… Horla… J’ai entendu… le Horla… c’est lui… le Horla… il est venu !…
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4. Aldous Huxley, Le meilleur des mondes (1932, chap. 2 ; traduction Jules Castier ; Ebooks Libres et Gratuits) : « À présent, tournez-les […] secousses électriques ».
—À présent, tournez-les de façon qu’ils puissent voir les fleurs et les livres. Tournés, les bébés firent immédiatement silence, puis ils se mirent à ramper vers ces masses de couleur brillantes, ces formes si gaies et si vives sur les pages blanches. Tandis qu’ils s’en approchaient, le soleil se dégagea d’une éclipse momentanée où l’avait maintenu un nuage. Les roses flamboyèrent comme sous l’effet d’une passion interne soudaine ; une énergie nouvelle et profonde parut se répandre sur les pages luisantes des livres. Des rangs des bébés rampant à quatre pattes s’élevaient de petits piaillements de surexcitation, des gazouillements et des sifflotements de plaisir. Le Directeur se frotta les mains :
—Excellent ! dit-il. On n’aurait guère fait mieux si ç’avait été arrangé tout exprès.
Les rampeurs les plus alertes étaient déjà arrivés à leur but. De petites mains se tendirent, incertaines, touchèrent, saisirent, effeuillant les roses transfigurées, chiffonnant les pages illuminées des livres. Le Directeur attendit qu’ils fussent tous joyeusement occupés. Puis : —Observez bien, dit-il. Et, levant la main, il donna le signal.
L’Infirmière-Chef, qui se tenait à côté d’un tableau de commandes électriques à l’autre bout de la pièce, abaissa un petit levier.
Il y eut une explosion violente. Perçante, toujours plus perçante, une sirène siffla. Des sonneries d’alarme retentirent, affolantes.
Les enfants sursautèrent, hurlèrent ; leur visage était distordu de terreur.
—Et maintenant, cria le Directeur (car le bruit était as-sourdissant), maintenant, nous passons à l’opération qui a pour but de faire pénétrer la leçon bien à fond, au moyen d’une légère secousse électrique.
Il agita de nouveau la main, et l’Infirmière-Chef abaissa un second levier. Les cris des enfants changèrent soudain de ton. Il y avait quelque chose de désespéré, de presque dément, dans les hurlements perçants et spasmodiques qu’ils lancèrent alors. Leur petit corps se contractait et se raidissait : leurs membres s’agitaient en mouvements saccadés, comme sous le tiraillement de fils invisibles.
—Nous pouvons faire passer le courant dans toute cette bande de plancher, glapit le Directeur en guise d’explication, mais cela suffit, dit-il comme signal à l’infirmière.
Les explosions cessèrent, les sonneries s’arrêtèrent, le hurlement de la sirène s’amortit, descendant de ton en ton jusqu’au silence. Les corps raidis et contractés se détendirent, et ce qui avait été les sanglots et les abois de fous furieux en herbe se répandit de nouveau en hurlements normaux de terreur ordinaire.
—Offrez-leur encore une fois les fleurs et les livres.
Les infirmières obéirent ; mais à l’approche des roses, à la simple vue de ces images gaiement coloriées du minet, du coco-rico et du mouton noir qui fait bêê, bêê, les enfants se reculèrent avec horreur ; leurs hurlements s’accrurent soudain en intensité.
—Observez, dit triomphalement le Directeur, observez.
Les livres et les bruits intenses, les fleurs et les secousses électriques, déjà, dans l’esprit de l’enfant, ces couples étaient liés de façon compromettante ; et, au bout de deux cents répétitions de la même leçon ou d’une autre semblable, ils seraient mariés indissolublement. Ce que l’homme a uni, la nature est impuissante à le séparer.
[...]
L’un des étudiants leva la main ; et, bien qu’il comprît fort bien pourquoi l’on ne pouvait pas tolérer que des gens de caste inférieure gaspillassent le temps de la communauté avec des livres, et qu’il y avait toujours le danger qu’ils lussent quelque chose qui fît indésirablement «déconditionner» un de leurs réflexes, cependant... en somme, il ne concevait pas ce qui avait trait aux fleurs. Pourquoi se donner la peine de rendre psychologiquement impossible aux Deltas l’amour des fleurs ?
Patiemment, le D.I.C.3 donna des explications. Si l’on faisait en sorte que les enfants se missent à hurler à la vue d’une rose, c’était pour des raisons de haute politique économique. Il n’y a pas si longtemps (voilà un siècle environ), on avait conditionné les Gammas, les Deltas, voire les Epsilons, à aimer les fleurs – les fleurs en particulier et la nature sauvage en général.
Le but visé, c’était de faire naître en eux le désir d’aller à la campagne chaque fois que l’occasion s’en présentait, et de les obliger ainsi à consommer du transport.
—Et ne consommaient-ils pas de transport ? demanda l’étudiant.
—Si, et même en assez grande quantité, répondit le D.I.C., mais rien de plus. Les primevères et les paysages, fit-il observer, ont un défaut grave : ils sont gratuits. L’amour de la nature ne fournit de travail à nulle usine. On décida d’abolir l’amour de la nature, du moins parmi les basses classes, d’abolir l’amour de la nature, mais non point la tendance à consommer du transport. Car il était essentiel, bien entendu, qu’on continuât à aller à la campagne, même si l’on avait cela en horreur. Le problème consistait à trouver à la consommation du transport une raison économiquement mieux fondée qu’une simple affection pour les primevères et les paysages. Elle fut dûment découverte. –Nous conditionnons les masses à détester la campagne, dit le Directeur pour conclure, mais simultanément nous les conditionnons à raffoler de tous les sports en plein air. En même temps, nous faisons le nécessaire pour que tous les sports de plein air entraînent l’emploi d’appareils compliqués. De sorte qu’on consomme des articles manufacturés, aussi bien que du transport. D’où ces secousses électriques.
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Questions : rédigez toutes les réponses !
1. En quoi peut-on dire que les quatre extraits présentent des créatures ? Pensez à l’étymologie du nom « créature ».
« Créature » : étymologie latine (creari : « produire ») ; *texte 1 : un homme créé à partir d’un cadavre ;
*texte 2 : humain créé à partir de pièces fabriquées par l’homme ;
*texte 3 : « esprits », créatures forgées par l’imagination ;
*texte 4 : bébés créés par la manipulation génétique, puis sélectionnés et conditionnés.
2. Identifiez les caractéristiques physiques et morales des créatures décrites dans chaque extrait ; faites trois citations par texte.
Texte 1 : « peau jaune », « dents blanches », « teint parcheminé », « couvraient à peine le tissu », « yeux transparents » → un mort-vivant, dépourvu de sentiments.
Texte 2 : le corps tout entier (les deux tiers du texte) est minutieusement décrit, mais on ne sait pas si le corps n’a pas encore pris vie.
Texte 3 : « invisibles », « intangibles » ; majoritairement des notations morales qui suggèrent le caractère maléfique (« épouvante », « mystérieux vouloir », « esclave », « terreur », « sortes de vampires).
Texte 4 : « terreur », « hurlements », « membres s’agitaient », « mouvements saccadés », « sifflotements de plaisir » : des bébés ordinaires physiquement, mais dont les réflexes émotifs sont conditionnés.
3. Dans chaque texte, identifiez qui décrit la ou les créatures.
Texte 1 : le scientifique, non nommé.
Texte 2 : Edison, l’ingénieur.
Texte 3 : l’auteur de l’article de la Revue du Monde Scientifique.
Texte 4 : le D.I.C. et, moins souvent, le narrateur.
4. Recherche documentaire (1) : quelle est la cause de l’apparition de chaque créature ?
*Texte 1 : Frankenstein, jeune scientifique, cherche à créer du vivant à partir de l’inanimé (cadavres ?).
*Texte 2 : Par amitié pour Lord Ewald, désir de créer la femme parfaite. L’ami ingénieur crée une androïde.
*Texte 3 : narrateur malade et qui ne connaît pas la cause de sa « folie » (peut-être le trois-mâts brésilien?).
*Texte 4 : volonté d’un régime totalitaire de cloner des populations, de les sélectionner et de les conditionner à des fins consuméristes et dictatoriales.
5. Recherche documentaire (2) : comment le monde des sciences et les spécialistes sont-ils représentés dans chaque extrait ?
*Texte 1 : avancées scientifiques remarquables ; mais univers sale, inquiétant et funeste d’un scientifique qui se néglige But louable.
*Texte 2 : avancées scientifiques remarquables, dans un cadre plus réaliste. Image positive du créateur (bienfaiteur du Lord), mais caractère industriel et désincarné de l’être créé.
*Texte 3 : sciences de l’époque (hypnose, Mesmer). Ironie portant sur le monde scientifique (impossibilité d’une épidémie développée par des esprits, le récit prend le dessus sur l’explication), dont les limites sont posées. La science comme l’ultime recours pour saisir le surnaturel.
*Texte 4 : avancées scientifiques ; le scientifique est l’allié du politique, du tyran : tous deux appartiennent à la classe dominante. Au détriment de l’exercice des libertés, du libre-arbitre.
6. Relisez à présent les chapitres 38 et 39 de Voyage au centre de la Terre. Quels êtres vivants, proches de l’Homme moderne, Jules Verne choisit-il de faire intervenir ?
Les êtres vivants présentés dans le roman :
-cadavre très bien conservé (38 ; allusion à Frankenstein) : homme de l’ère quaternaire ;
-un géant, comparé à Polyphème (39).
7. En quoi ces êtres diffèrent-ils des créatures des extraits 1 à 4 ?
Ces êtres sont des produits de la nature (quoique leur origine soit inexpliquée). Non des produits de l’imagination (texte 3), ni des produits de la science (1, 2 et 4).
8. Créez un tableau à double entrée qui vous servira à comparer les quatre extraits aux chapitres 38 et 39. Faites notamment figurer les termes :
romantisme / réalisme / merveilleux / fantastique / science-fiction / création d’une machine ressemblant à l’homme / évocation de personnages d’apparence humaine / évocation de puissances contrôlant la pensée de l’individu / critique des excès de la science / éloge de la science / apparition en partie expliquée d’une créature ressemblant à l’homme / narration fondée sur des données scientifiques actualisées / produire l’effroi et l’étonnement / faire s’interroger sur l’identité humaine / faire s’interroger sur l’origine des hommes / dépeindre l’impossibilité pour un personnage d’expliquer la venue d’une créature / délivrer un message contre les régimes totalitaires, au sujet de la liberté humaine / récit de science-fiction dystopique / nouvelle fantastique / roman d’aventures réaliste et fantastique / roman épistolaire fantastique / roman de science-fiction
Ces notions alimenteront ces entrées de votre tableau : mouvement littéraire et culturel / registre dominant / point de vue de la narration au sujet des sciences / fonction possible de la créature / genre littéraire
9. Expliquez en quinze lignes par quels procédés ces quatre extraits, ainsi que les chapitres 38 et 39 de Voyage au centre de la Terre, interrogent l’identité de l’Homme et mettent en lumière les fragilités humaines.
1En latin « Ce qu’il fallait démontrer ».
2Latin : traduire ici par « questions ».
3Directeur de l’Incubation et du Conditionnement
1. En quoi peut-on dire que les quatre extraits présentent des créatures ? Pensez à l’étymologie du nom « créature ».
« Créature » : étymologie latine (creari : « produire ») ;
*texte 1 : un homme créé à partir d’un cadavre ;
*texte 2 : humain créé à partir de pièces fabriquées par l’homme ;
*texte 3 : « esprits », créatures forgées par l’imagination ;
*texte 4 : bébés créés par la manipulation génétique, puis sélectionnés et conditionnés.
2. Identifiez les caractéristiques physiques et morales des créatures décrites dans chaque extrait ; faites trois citations par texte.
Texte 1 : « peau jaune », « dents blanches », « teint parcheminé », « couvraient à peine le tissu », « yeux transparents » → un mort-vivant, dépourvu de sentiments.
Texte 2 : le corps tout entier (les deux tiers du texte) est minutieusement décrit, mais on ne sait pas si le corps n’a pas encore pris vie.
Texte 3 : « invisibles », « intangibles » ; majoritairement des notations morales qui suggèrent le caractère maléfique (« épouvante », « mystérieux vouloir », « esclave », « terreur », « sortes de vampires).
Texte 4 : « terreur », « hurlements », « membres s’agitaient », « mouvements saccadés », « sifflotements de plaisir » : des bébés ordinaires physiquement, mais dont les réflexes émotifs sont conditionnés.
3. Dans chaque texte, identifiez qui décrit la ou les créatures.
Texte 1 : le scientifique, non nommé.
Texte 2 : Edison, l’ingénieur.
Texte 3 : l’auteur de l’article de la Revue du Monde Scientifique.
Texte 4 : le D.I.C. et, moins souvent, le narrateur.
4. Recherche documentaire (1) : quelle est la cause de l’apparition de chaque créature ?
*Texte 1 : Frankenstein, jeune scientifique, cherche à créer du vivant à partir de l’inanimé (cadavres ?).
*Texte 2 : Par amitié pour Lord Ewald, désir de créer la femme parfaite. L’ami ingénieur crée une androïde.
*Texte 3 : narrateur malade et qui ne connaît pas la cause de sa « folie » (peut-être le trois-mâts brésilien?).
*Texte 4 : volonté d’un régime totalitaire de cloner des populations, de les sélectionner et de les conditionner à des fins consuméristes et dictatoriales.
5. Recherche documentaire (2) : comment le monde des sciences et les spécialistes sont-ils représentés dans chaque extrait ?
*Texte 1 : avancées scientifiques remarquables ; mais univers sale, inquiétant et funeste d’un scientifique qui se néglige But louable.
*Texte 2 : avancées scientifiques remarquables, dans un cadre plus réaliste. Image positive du créateur (bienfaiteur du Lord), mais caractère industriel et désincarné de l’être créé.
*Texte 3 : sciences de l’époque (hypnose, Mesmer). Ironie portant sur le monde scientifique (impossibilité d’une épidémie développée par des esprits, le récit prend le dessus sur l’explication), dont les limites sont posées. La science comme l’ultime recours pour saisir le surnaturel.
*Texte 4 : avancées scientifiques ; le scientifique est l’allié du politique, du tyran : tous deux appartiennent à la classe dominante. Au détriment de l’exercice des libertés, du libre-arbitre.
6. Relisez à présent les chapitres 38 et 39 de Voyage au centre de la Terre. Quels êtres vivants, proches de l’Homme moderne, Jules Verne choisit-il de faire intervenir ?
Les êtres vivants présentés dans le roman :
-cadavre très bien conservé (38 ; allusion à Frankenstein) : homme de l’ère quaternaire ;
-un géant, comparé à Polyphème (39).
7. En quoi ces êtres diffèrent-ils des créatures des extraits 1 à 4 ?
Ces êtres sont des produits de la nature (quoique leur origine soit inexpliquée). Non des produits de l’imagination (texte 3), ni des produits de la science (1, 2 et 4).
Question 8
|
Texte 1 Frankenstein |
Texte 2 L’Ève future |
Texte 3 Le Horla |
Texte 4 Le meilleur des Mondes |
Chapitres 38 et 39 de Voyage au Centre de la Terre |
Mouvement littéraire et culturel |
Romantisme |
Réalisme / symbolisme |
Réalisme |
Réalisme |
Réalisme |
Registre dominant |
Fantastique |
Fantastique |
Fantastique |
Pathétique / tragique |
Merveilleux : apparition en partie expliquée d'une créature ressemblant à l'homme |
Point de vue de la narration au sujet des sciences |
Critique des excès de la science |
Critique des excès de la science |
Dépeindre l'impossibilité pour un personnage d'expliquer la venue d'une créature |
Critique des excès de la science |
Éloge de la science ; narration fondée sur des données scientifiques actualisées
|
Fonction possible de la créature |
Produire l'effroi et l'étonnement |
Création d'une machine ressemblant à l'homme |
Produire l'effroi et l'étonnement Évocation de puissances contrôlant la pensée de l'individu |
Faire s'interroger sur l'identité humaine Délivrer un message contre les régimes totalitaires au sujet de la liberté humaine |
Faire s'interroger sur l'origine de l'homme |
Genre littéraire |
Roman épistolaire et fantastique |
Roman de science-fiction |
Nouvelle fantastique |
Récit de science-fiction dystopique |
Roman d'aventures réaliste et fantastique |
Question 9
La science, dans ce corpus du « parcours associé », permet à la fois de manifester dans la fiction les faiblesses humaines et d’interroger l’origine et le sens de la destinée humaine.
Ainsi dans le roman épistolaire Frankenstein, le créateur a sacrifié une partie de sa vie dans le but de créer un personnage qu'il déteste une fois son œuvre terminée. C’est que la créature qui prend vie est à la fois trop humaine et insuffisamment vivante ; elle fait penser à un mort-vivant et devient un motif d’effroi fantastique. La science, dans l’extrait 1, est donc présentée à travers ses excès et les désastres dont elle peut être à l’origine.
Au contraire, dans L’Ève future et Le meilleur des Mondes, les scientifiques sont fascinés par leurs résultats jusqu'à ne plus se soucier des conséquences éthiques de leur invention : l’être créé est doué de pensées artificielles, ce qui est de nature à troubler les rapports humains et la relation des hommes à la nature ou à un principe créateur. Dans le récit d’Aldous Huxley, c’est l’humanité entière qui est menacée par la tyrannie eugéniste : les scientifiques contrôlent non seulement les naissances, mais encore conditionnent les catégories créées. La liberté humaine est ainsi remise en cause par Villiers de l’Isle-Adam et l’écrivain britannique. Dans Voyage au Centre de la Terre, Jules Verne se questionne sur l'origine de la Terre et des hommes à l’occasion d’un voyage qui se révèle être une remontée dans le temps : mais les créatures rencontrées produisent tantôt l’étonnement scientifique (l’homme de l’ère quaternaire serait plus ancien qu’un individu fossilisé trouvé à la surface du globe), tantôt l’émerveillement devant l’inexpliqué (une créature qui semble sortie de l’Odyssée).
Quant au Horla de Maupassant, nous y constatons que la créature imaginaire provoque la terreur chez le personnage principal, bien qu’il semble avoir découvert l’explication scientifique de la venue de ce mal inconnu, qu’il finit par nommer le « Horla » ; cet être immatériel domine tant la conscience du narrateur que celui-ci ne perçoit pas l’incapacité de la science à résoudre certaines problématiques psychiques. Nul doute que Maupassant ait voulu dépeindre avec ironie la figure du scientifique, ce en quoi nous pouvons le rapprocher de l’auteur de L’Ève future.
Question 9
La science, dans ce corpus du « parcours associé », permet à la fois de manifester dans la fiction les faiblesses humaines et d’interroger l’origine et le sens de la destinée humaine.
Ainsi dans le roman épistolaire Frankenstein, le créateur a sacrifié une partie de sa vie dans le but de créer un personnage qu'il déteste une fois son œuvre terminée. C’est que la créature qui prend vie est à la fois trop humaine et insuffisamment vivante ; elle fait penser à un mort-vivant et devient un motif d’effroi fantastique. La science, dans l’extrait 1, est donc présentée à travers ses excès et les désastres dont elle peut être à l’origine.
Au contraire, dans L’Ève future et Le meilleur des Mondes, les scientifiques sont fascinés par leurs résultats jusqu'à ne plus se soucier des conséquences éthiques de leur invention : l’être créé est doué de pensées artificielles, ce qui est de nature à troubler les rapports humains et la relation des hommes à la nature ou à un principe créateur. Dans le récit d’Aldous Huxley, c’est l’humanité entière qui est menacée par la tyrannie eugéniste : les scientifiques contrôlent non seulement les naissances, mais encore conditionnent les catégories créées. La liberté humaine est ainsi remise en cause par Villiers de l’Isle-Adam et l’écrivain britannique. Dans Voyage au Centre de la Terre, Jules Verne se questionne sur l'origine de la Terre et des hommes à l’occasion d’un voyage qui se révèle être une remontée dans le temps : mais les créatures rencontrées produisent tantôt l’étonnement scientifique (l’homme de l’ère quaternaire serait plus ancien qu’un individu fossilisé trouvé à la surface du globe), tantôt l’émerveillement devant l’inexpliqué (une créature qui semble sortie de l’Odyssée).
Quant au Horla de Maupassant, nous y constatons que la créature imaginaire provoque la terreur chez le personnage principal, bien qu’il semble avoir découvert l’explication scientifique de la venue de ce mal inconnu, qu’il finit par nommer le « Horla » ; cet être immatériel domine tant la conscience du narrateur que celui-ci ne perçoit pas l’incapacité de la science à résoudre certaines problématiques psychiques. Nul doute que Maupassant ait voulu dépeindre avec ironie la figure du scientifique, ce en quoi nous pouvons le rapprocher de l’auteur de L’Ève future.